Yves Devillechabrolle

Ailier de débordement issu de la France profonde, Yves Devillechabrolle fit malgré des lacunes évidentes une belle carrière en D2, obtenant un titre de champion de France avec Tours en 1984. Le prototype même du joueur de club : modeste mais guerrier et plein d’abnégation.

En Bref

TGV
10 février 1957

Attaquant

Saison Club Nb matchs Nb buts
1980 – 1981
UES Montmorillon
33 1
1981 – 1982
FC Tours
11 1
1982 – 1983
FC Tours
27 5
1983 – 1984
FC Tours
32 2
1984 – 1985
FC Tours
27 2
1985 – 1986
FC Tours
27 0
1986 – jan 1987
AS Béziers
21 0
jan 1987 – 1987
FC Martigues
11 1
1987 – 1988
CO Saint-Dizier
34 ?

  • 1980 –1981 :



    UES Montmorillon
     

  • 1981 –
    1986 :



    FC Tours
     
  • 1986 –
    jan 1987 :



    AS Béziers
     
  • jan 1987 –
    1987 :



    FC Martigues
     
  • 1987 –
    1988 :



    CO Saint-Dizier
     

  • 1984 : Champion de France de D2 (Tours)

Sa vie, son oeuvre

Sa carrière en club

Né dans la Creuse à Mourioux-Vieilleville, Yves Devillechabrolle, 1m 82 pour 75 kg, incarne cette spécificité bien française de l’ailier de débordement à l’ancienne, impeccable relayeur du 4-3-3 des familles. Du bon diesel nourri dans les seigles de la cambrousse franchouillarde. C’est au sein de l’entente sportive Bénévent-Marsac crée en 1978 que celui qui deviendra bientôt « l’homme aux trois poumons » fait ses premiers pas. Les deux bourgs qui sont limitrophes ont fusionné. Lors de la première saison, l’équipe fanion est composée d’environ une moitié de joueurs issus du club de Marsac et une autre moitié du club de Bénévent. L’USBM, entraînée par Bernard Roilette qui restera entraîneur de l’équipe fanion jusqu’à l’année 2004, terminera à la 6ème place du championnat de promotion de ligue lors de la première année suivant la fusion.

Dès la saison suivante, l’ESBM réalise un étonnant parcours en Coupe de France qui scelle la réussite de l’union entre les deux bourgs. Elle accède au 6ème tour (la rentrée des clubs professionnels intervient au 7ème tour), en battant notamment Brive, leader invaincu en 4ème division nationale. Ce parcours coïncidera avec l’éclosion du jeune Devillechabrolle, bon buteur doté d’une grosse pointe de vitesse. A l’été 1980, ce dernier passe donc semi-professionnel à l’US Montmorillon qui est monté en deuxième division l’année précédente sous la houlette de Denis Devaux. L’essor industriel du principal sponsor, le groupe Ranger, personnalisé par son omnipotent président Jean Ranger, profite au club du nord de la Vienne qui a accédé au niveau national (CFA) au début des années 70, puis qui va rester durant deux saisons en D2. Depuis 1959, Ranger fabrique à Montmorillon des meubles qui se vendent dans la France entière d’abord sous son propre nom puis sous l’enseigne Domoform.
Quelques joueurs sont signés avec des contrats semi-pros qui leur permettent de travailler dans l’entreprise tout en vivant à fond leur passion. Les autres travaillent à plein temps : Savatier est charcutier, Serge Fumeron est employé municipal, Gilles Gatefait est au P.T.T. La plupart sont étudiants, fonctionnaires, flics, exploitants agricoles. Toutes proportions gardées, Montmorillon est une sorte de Trinquant avant la lettre, perpétuant des valeurs qui n’existent plus dans le football moderne : entraide, partage, démocratie (pour éviter de gréver les finances locales, la montée en D2 en 79 fera l’objet d’un référendum auprès de la population ce qui reste une incongruité dans le football professionnel).

L’UES, troisième club de foot de la Vienne derrière Poitiers et Châtellerault, affiche l’un des plus petits budgets du championnat. Entraîné par Mohamed Lekkak, un coach à l’ancienne aux allures de caporal qui prône le marquage individuel et refuse obstinément la zone, il n’a dû son maintien qu’à un repêchage, car Vauban-Strasbourg et Belfort ont refusé la montée. Dans le petit stade de la route d’Haims, toujours plein, les Macarons se battent avec leurs moyens, avec les Marchand, Delpierre, Bajou, Poinot, Grégoire, Gatefait, Fumeron. Les chaudes soirées contre Rouen, Guingamp, Angers ou Rennes attirent jusqu’à 4000 spectateurs. Le club entame correctement la saison mais le déclin de l’entreprise Ranger précipitera la fin de cette belle aventure. En 1981 malgré les huit buts de Devillechabrolle, Montmorillon 17e du groupe B est relégué en D3. Durant l’été, les bonnes relations entre les dirigeants tourangeaux et montmorillonnais entraînent le transfert du jeune attaquant vers le club des bords de Loire. C’est Yvon Jublot, le directeur sportif du FCT qui avait présenté Mohamed Lekkak, qu’il avait croisé antérieurement à Cherbourg, à ses futurs dirigeants. Le renvoi d’ascenseur s’effectuera par le biais d’un transfert définitif en Touraine.

Voilà donc le grand échalas sur la pelouse du stade de la Vallée du Cher. Avec son caractère rustique et campagnard, il finira naturellement par s’imposer même si on se demandera pendant longtemps ce qu’il faisait là. Les débuts sont difficiles. Devillechabrolle n’est pas précisément un grand buteur. Tout juste un gars plein de bonne volonté, qui court vite et qui sait percuter, créant des brèches dans la défense adverse. Qu’importe puisque qu’Onnis enfile les buts comme d’autres les perles. Il suffit simplement de le servir dans les dix-huit mètres, là même où Devillechabrolle va faire équipe avec l’autre grand dadais de service, à savoir : Bernard Ferrigno. Un à droite, et l’autre à gauche. Il faut bien deux ailiers, car Delio ne court pas, il attend simplement les caviards. Il faut attendre la saison 82-83 pour voir Devillechabrolle jouer les utilités et prendre un surnom prometteur : TGV. L’entraîneur hollandais Hennie Hollink qui aime bien le football total, le fait jouer à 27 reprises, mais pas toujours titulaire.
L’équipe est pourrie par les clans, le clan Steck contre le clan Onnis notamment, avec au beau milieu quelques indécis qui observent sans trop savoir. Le FCT s’illustre en Coupe de France où Devillechabrolle se fait expulser en demi-finale par un Gérard Lartigot, peu inspiré, ce qui prouve bien que les problèmes d’arbitrage ne datent pas d’hier. Tours échoue contre le PSG. La fin de saison est pathétique. Battue en barrage par Nîmes, l’équipe redescend en Ligue 2 malgré un effectif incroyable avec Dominique Marais, Karim Maroc, Guy Lacombe, Delio Onnis, Omar Da Fonseca et Alain Polaniok,

Devillechabrolle se retrouve donc en D2 où il va disputer sa meilleure saison avec Guy Briet, un coach à l’ancienne qui aime les gros diesels. Il joue 36 matchs et marque 5 buts dans l’ombre de Da Fonseca, et le libéro Patrice Loiseau. Tours champion de France de D2 retourne en D1 où il ne restera que 12 mois. Cette fois, le Creusois est titulaire mais il ne marque toujours pas. Et comme Onnis n’est plus là, les choses sont un peu plus difficiles. La suite a tout du chemin de croix malgré une petite embellie sur la fin. Mais Tours laisse les barrages à Rouen et prend la place du cocu (19e) à l’issue d’un match navrant à Laval. Retour en D2 donc, pour deux saisons anonymes malgré une nouvelle aventure en Coupe de France (quart de finale, éliminé par le futur vainqueur Bordeaux).

Durant l’été 86, il s’exile à Béziers où il retrouve Frédéric Dobraje mais où il ne jouera guère, essentiellement comme remplaçant. Au mois de janvier, il part à Martigues où il joue encore moins. Il lui faut remonter vers le nord-est et Saint-Dizier pour retrouver le goût des grandes années tourangelles. En Haute-Marne, avec Benoît Beaumet, Christophe Avril et Bruno Lalevée (qui rejoindra Tours la saison suivante), il retrouve une place de titulaire dans un collectif sans saveur, entraîné par Robert Buigues, un autre coach de la classe low-cost.

A l’été 88, le CO Saint-Dizier est relégué en D3. A 32 ans, Devillechabrolle en profite pour s’éclipser doucement. Clap de fin sur une carrière correcte mais sans grandes envolées. Mais pas si mauvaise finalement, quant on sait que le joueur commença son parcours au fin fond de la Creuse sans passer par le moindre centre de formation…

Que devient-il ?

Yves Devillechabrolle n’a pas quitté le centre de la France, mais il se fait très discret. Aux dernières nouvelles, il serait éducateur dans la région de Brive. Le bonheur est dans le pré ?